L’appellation d’un légume peut stimuler sa consommation

Les messages santé ne suffisent pas à eux seuls

En réponse à l’augmentation de l’obésité, la tendance à la santé s’installe aussi dans de nombreux établissements de restauration, rapides ou traditionnels. Ironiquement, une description ou un étiquetage qui vante les atouts santé des aliments servis pourrait en fait s’avérer contre-productif. Pourquoi?

Car dans l’inconscient collectif, les aliments labellisés «sains» sont perçus comme moins goûteux et aussi moins rassasiants. A l’opposé, des aliments plus gras, salés et/ou sucrés sont davantage attachés à des notions de plaisir, de satiété et font davantage appel à des descriptions dites «indulgentes».

Dans cette étude publiée dans JAMA Internal Medicine, les chercheurs ont donc décidé de prendre le contre-pied de cette attitude du consommateur. Et si on rendait des aliments qui sont perçus très sains, comme les légumes, beaucoup plus sexy et «appealing»? Les résultats sont pour le moins déroutants!

Le légume «super héros» augmente la consommation

L’expérience a été conduite en 2016 au sein d’une grande cafétéria de l’Université de Stanford, pendant 46 jours, où chaque jour l’équivalent de 607 déjeuners sont servis à des étudiants de l’établissement. De manière aléatoire, chaque jour, un «légume du jour» se voyait attribuer une description :

  • basique,
  • santé restrictive (pauvre en…),
  • santé positive (riche en…) ou
  • indulgente (description attractive).

Les chercheurs ont évalué discrètement au self-service la sélection des légumes, ainsi que le poids des portions de légumes consommées (en mesurant ce qui était prélevé dans les récipients du service). Au terme de l’étude, 29,6% des repas servis (8279 sur 27933) étaient composés du «légume du jour». Et l’analyse révèle que la description change le comportement du tout au tout!

Ainsi, une description indulgente du légume s’accompagne par une augmentation de sa sélection de 25%, en comparaison avec une description basique… Et de 41% et 35% respectivement pour les descriptions santé restrictive et santé positive.

Mieux encore, un légume doté d’une description indulgente plus «sexy» serait consommé significativement en plus grande quantité:

  • +23% en comparaison du légume basique,
  • +33% par rapport au légume «restrictif».

Et cela, alors que les préparations des dits légumes étaient strictement les mêmes!

Être créatif avec les légumes, ça marche aussi pour les enfants!

La stratégie du «légume, ce héros» n’est pas sans fondement. En 2012 déjà, une étude publiée par David Morizet dans Appetite, dans le cadre d’une thèse effectuée en collaboration avec la Fondation Louis Bonduelle, apporte les mêmes conclusions.

Chez des enfants de 8 à 11 ans, on constate une préférence pour un plat intitulé «spécial mix pour super héros», ce qui favorise leur familiarisation et l’acceptation de certains légumes qui ont moins de succès à la cantine. Les intitulés de type «légumes du grand chef», «légumes surprises», «légumes frais du jardin» ou «légumes au bon goût» résonnent également mieux auprès des enfants.

Une preuve encore que pour mettre l’eau à la bouche des plus petits, il faut aussi pouvoir y mettre les bons mots…

Turnwald B.P. et al., JAMA Intern Med., Published online June 12, 2017.
Morizet D. et al., Appetite, 2012 Oct; 59 (2): 399-402.