La transition alimentaire, une priorité pour notre civilisation !

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« Nous sommes en train de détruire la civilisation, notre système alimentaire doit impérativement changer, et il y a des solutions ». C’est le message que nous livre le célèbre épidémiologiste Walter Willett (Harvard Medical School) que nous avons pu interviewer.

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Qui est Walter Willett ? 

Walter C. Willett est professeur d’épidémiologie et de nutrition à la Harvard T.H. Chan School of Public Health et professeur de médecine à la Harvard Medical School, à Boston. Il mène des recherches sur les relations entre l’alimentation et la santé depuis plus de 40 ans, et a plus de 1700 publications scientifiques à son actif. Il a notamment co-présidé la commission EAT-Lancet, qui a développé l’assiette planétaire capable de nourrir les 10 milliards de personnes que comptera le monde en 2050.

Pourquoi parle-t-on aujourd’hui de transition alimentaire et quels sont les enjeux qui lui sont associés ?

W.W : « Nous sommes confrontés à une crise nutritionnelle dans de nombreux pays en raison d’une épidémie d’obésité qui ne faiblit pas. Dans le même temps, nous sommes en passe de détruire la civilisation telle que nous la connaissons en raison du changement climatique, et notre système alimentaire y contribue largement ».

En quoi une alimentation plus végétale est-elle bénéfique ?

W.W. « Une alimentation basée principalement sur des végétaux sains, sans nécessairement être une alimentation strictement végane, aurait des avantages majeurs pour la santé en fournissant des aliments plus riches en nutriments, en graisses saines et en composés phytochimiques que les régimes occidentaux actuels, tout en limitant les graisses saturées et le cholestérol. Ce même régime de type « flexitarien » ou « axé sur les plantes » aurait des avantages majeurs pour la planète en raison de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, de la diminution de l’utilisation des terres et de la pollution. À lui seul, il ne résoudra pas le problème du changement climatique, mais il constitue un élément essentiel pour éviter un réchauffement planétaire désastreux ».

Pour réaliser l’assiette EAT-Lancet pour nourrir le monde en 2050, quels sont les nutriments qui ont été pris en compte ? Y a-t-il des nutriments qui posent plus de problèmes ?

W.W. « Nous avons pris en compte tous les nutriments, et l’assiette EAT-Lancet est nutritionnellement saine. Cette assiette contient environ deux portions d’aliments d’origine animale par jour ; si une personne décide de réduire sa consommation de ces aliments, il sera important d’obtenir une quantité suffisante de vitamine B-12 par le biais de suppléments ou d’aliments enrichis ».

Concrètement, quels sont les aliments dont la consommation doit être augmentée ou réduite ?

WW. « Par rapport aux apports actuels dans presque tous les pays, il s’agit d’augmenter la consommation de fruits, légumes, céréales complètes, noix, légumineuses, aliments à base de soja et poisson. Dans les pays à revenu élevé, cela suppose une réduction de la consommation de viande rouge, de volaille et, dans certains cas, d’œufs.  Dans certaines régions du monde, les quantités de ces aliments sont déjà égales ou inférieures à nos objectifs, et aucune réduction n’est donc nécessaire ».

L’assiette planétaire est-elle atteignable ? Quelles sont les conditions du succès pour atteindre cette alimentation ?

W.W. « Il s’agit d’un objectif réaliste ; ce modèle alimentaire est conforme au régime méditerranéen traditionnel et aux régimes traditionnels de nombreuses régions du monde.  Il peut être composé avec des aliments et des saveurs de presque tous les pays. Cependant, il reste beaucoup à faire pour y parvenir, notamment une éducation et une sensibilisation généralisées, ainsi que des politiques qui rendent ce régime abordable et accessible à tous ».

Avez-vous un conseil à donner pour concevoir facilement ce régime ?

W.W. « Une façon simple de concevoir ce régime est de penser 1 + 1 pour les protéines animales : environ une portion de produits laitiers par jour et une portion par jour d’autres aliments d’origine animale (dont la viande rouge une fois par semaine).  À cela s’ajoutent des noix, des légumineuses et des aliments à base de soja, une consommation abondante de fruits et de légumes, des céréales complètes et des graisses saines. C’est assez simple, cela offre une grande diversité de saveurs merveilleuses. Nous devons faire de ce mode d’alimentation une nouvelle référence, car il est parfait pour la santé humaine et planétaire…. et peut être agréable ».