Quelle agriculture pour une alimentation plus durable ?

Comment l’agriculture évolue-t-elle pour devenir plus durable ? Comment rendre les légumes plus accessibles aux consommateurs ? Rencontre avec Thierry Baillet, agriculteur et « Youtubeur » qui partage sa passion pour son métier.

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Qui est « Thierry Baillet » ? 

  • 49 ans
  • Agriculteur dans le Nord-Pas-de-Calais (commune de Loos-en-Gohelle)
  • Exploitation de polyculture (pois, betterave, pomme de terre, colza, blé, oignons, potimarron, carotte)
  • « Youtubeur » et actif sur les réseaux sociaux
  • Auteur du livre « Dans les bottes de ceux qui nous nourrissent »

Fils d’agriculteur, Thierry Baillet est installé sur la ferme depuis l’âge de 23 ans. Curieux pour les sciences, il a fait peu à peu évoluer son exploitation. De la polyculture traditionnelle, il est passé à une agriculture plus durable, avec une partie en conversion « bio ». Sa passion pour l’agriculture, ses réflexions, ses joies et ses coups de gueule, il aime les partager sur les réseaux sociaux. En 7 ans, il a développé une communauté de 84 000 followers sur YouTube, 35 000 sur Facebook, 10 000 sur Instagram et 8000 sur Twitter…

L’alimentation durable, en quoi est-ce une priorité pour vous ?

 

C’est devenu une évidence, encore plus depuis que je communique sur les réseaux sociaux. En effet, cela m’incite à réfléchir à ce que je mets en place, tant pour l’aliment en soi, sa qualité, mais aussi pour l’environnement. J’ai des retours directs d’agriculteurs, de consommateurs, qui sont positifs par rapport à la durabilité. J’aime avancer dans la réflexion et aller jusqu’au bout des choses. Je ne défends pas un modèle unique, mais la pluralité de l’agriculture. Par exemple, le « tout bio » n’est pas une solution ultime, et la technologie est utile pour évoluer vers des modèles plus durables.

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Comment rendre les légumes plus accessibles aux consommateurs ? 

 

Je pense qu’il y a un gros travail à réaliser dans l’éducation du consommateur. Dans de nombreux pays, il y a des légumes dans tous les supermarchés. L’offre est donc généralement là, encore faut-il que le consommateur se dirige vers eux. Il faut aussi lever certaines barrières sur l’aspect économique : cela ne coûte pas plus cher de préparer des légumes soimême que d’acheter un plat préparé ! 

Autre frein à la consommation de légumes : l’évolution de la société qui « n’a pas le temps ». Ou plutôt qui ne prend pas le temps de préparer les aliments. Résultat : certaines générations sont tout simplement incapables de préparer des plats, même simples, de cuire des légumes…

Enfin, il y a un rôle aussi pour la distribution dans la valorisation : trop souvent, on vante la promotion, et pas la qualité du produit. Le pourcentage de dépense des ménages consacré à l’alimentation n’a de cesse d’évoluer à la baisse depuis 50 ans. Or, la qualité a un coût, et une alimentation de qualité devrait être une priorité. 

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Quelles techniques utilisez-vous dans votre démarche de durabilité ?

 

La technologie s’avère très utile pour limiter les intrants, à savoir les engrais et les produits phytosanitaires. Pour les engrais, je fais une analyse du sol et je n’apporte que ce qui est nécessaire. Une cartographie du sol permet d’apporter la bonne dose d’engrais au bon moment et au bon endroit. C’est de l’ « agriculture de précision ». Nous disposons aussi d’outils d’aide à la décision, qui permettent de limiter l’utilisation des produits phytosanitaires grâce à des modèles prédictifs sur le risque de maladies pour les cultures.

 En quoi l’alimentation durable peut-elle renforcer l’accessibilité ?

 

Si on fait réfléchir le consommateur à son alimentation, il peut avoir une prise de conscience et comprendre l’intérêt de la durabilité, d’une agriculture plus respectueuse de l’environnement. Cela passe entre autres par les circuits courts, comme des achats à la ferme. Il importe aussi d’agit de façon groupée : agriculteurs, transformateurs, commerçants et consommateurs peuvent faire changer les choses. Si le consommateur veut acheter au moins cher, ça ne va pas, pas plus que si la marge prise par le distributeur est top grande, ou que l’agriculteur ne vit pas de son travail.  Il faut une revalorisation des produits de l’agriculture.

Quel est votre souhait pour l’alimentation de demain ?

 

Il s’agit de retrouver la connexion entre le producteur et le consommateur, en passant par les intermédiaires. Un produit comme un légume vient d’une région, il a été cultivé par un agriculteur pour être consommé. Il importe de remettre de l’humain dans ce parcours, alors n’hésitez pas à aller à la rencontre d’agriculteurs dans votre région ! 

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